La polémique autour du concours d’entrée à l’École Nationale d’Administration (ENA), session d’août 2024, loin de s’estomper, prend une tournure de plus en plus amère. Tandis que le collectif Tous contre la fraude continue de dénoncer des irrégularités « flagrantes » et des cas de favoritisme présumés, l’administration semble camper sur ses positions. Le ministère de la Fonction publique a annoncé l’ouverture des inscriptions pour les candidats déclarés admis, malgré le caractère litigieux des résultats.
Depuis plusieurs mois, les rues de Libreville et les réseaux sociaux résonnent des revendications des candidats recalés, regroupés au sein du collectif Tous contre la fraude. Armés de preuves, de témoignages d’incohérences et de constats d’huissier venant appuyer leurs allégations, ils ont multiplié les actions : sit-in devant l’Assemblée nationale, grèves de la faim, interpellations directes des plus hautes autorités de la Transition.
Pourtant, malgré cette mobilisation soutenue, le ministère de la Fonction publique et du Renforcement des capacités vient de publier un calendrier académique détaillé pour l’intégration des candidats déclarés admis. Les frais d’inscription doivent être réglés dès ce mois de juin. Une démarche qui entérine, de fait, les listes contestées, et semble ignorer la vague d’indignation.
Cette décision soulève de nombreuses interrogations. Comment le gouvernement de Transition, arrivé au pouvoir en promettant une « restauration » de l’État et une lutte implacable contre les dérives du passé, peut-il adopter une telle posture ?
La publication de ce calendrier suggère une volonté de clore le dossier, quitte à balayer les revendications des recalés. Le silence assourdissant de l’administration face aux arguments documentés du collectif est particulièrement frappant. À ce jour, aucune enquête indépendante, transparente et rendue publique n’a été menée pour dissiper les doutes.
Pour les membres de Tous contre la fraude, c’est une défaite au goût amer. Ils y voient la preuve que la corruption et le népotisme perdurent, même sous l’ère de la Cinquième République pourtant brandie comme symbole de renouveau.
Ils craignent que le dossier soit étouffé, laissant les auteurs présumés des fraudes impunis, et les victimes sans justice.
Si l’ENA, censée former l’élite administrative de demain, voit son concours discrédité par de telles accusations restées sans suite, quel message est envoyé sur les valeurs de méritocratie et de probité au sein de l’État ?
L’entêtement de l’administration dans ce dossier pourrait bien marquer durablement la crédibilité de la Transition et jeter une ombre sur ses ambitions de restauration.